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Actualité de l'assurance

La réforme du courtage et le rôle des associations professionnelles

LA CHRONIQUE RH ET FORMATION par Marie Collin, formatrice Ifpass, publiée en décembre 2023 dans le n°296 de La Tribune de l’assurance.

- Lors de sa séance du 22 mars 2022, le Collège de l’ACPR a délivré un agrément à sept associations, dont six en qualité d’associations professionnelles de courtiers en banque et assurance et une association en seule qualité d’association professionnelle de courtiers en assurance.
- La représentativité professionnelle desdites associations constitue un critère déterminant. (L’ACPR devra revoir si les critères de représentativité sont toujours respectés dans les 2 ans qui suivent l’agrément desdites associations)
- Au moment de la mise en place de la Réforme du courtage environ 40.000 intermédiaires étaient concernés par l’obligation d’adhérer à une association professionnelle agréée.

La question légitime que toute la profession se pose désormais est quel est le rôle de ces associations agréées par l’ACPR.

Pour rappel la loi du 8 avril 2021 relative à la réforme du courtage d’assurance et du courtage en opérations de banque et en services de paiement avait pour objectif dés avant son adoption, le mise en place d’associations professionnelles agréées par l’ACPR à adhésion obligatoire.


Dès avant son adoption dans l’exposé des motifs du projet de la loi il était énoncé :

« Or le monde du courtage d’assurance et du courtage en opération de banque et service de paiement n’est historiquement pas aisé à contrôler.  En effet, les courtiers comme les IOBSP ne sont pas soumis au contrôle permanent de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), qui dispose d’assez peu d’informations pour cibler ses contrôles sur cette population.  Enfin, il nous apparaît opportun d’aider les intermédiaires en assurance et en opération de banque et services de paiement à s’organiser et à se préparer à moyen terme pour faire face aux défis des nouveaux modes de distribution numériques.

Mieux structurées, mieux accompagnées, ces professions seront mieux à même de faire face à ces évolutions, via la création d’associations professionnelles, à adhésion obligatoire, agréées par l’ACPR.

Ces associations exerceront en outre leurs missions de vérification et d’accompagnement dans des conditions d’indépendance et d’impartialité contrôlées par l’ACPR. »


Si le texte de loi pose le principe de ce que la Direction Générale du Trésor a appelé « l’autorégulation » de la profession, la publication du décret du 1er décembre 2021 (n° 2021-1552, paru au JO du 2 décembre 2021) viendra expliquer les modalités de mise en œuvre opérationnelle ainsi  le degré d’exigence attendu des futures associations professionnelles.

Comme l’affirme la loi, les associations professionnelles assumeront principalement deux missions :
1)    La vérification du respect par leurs adhérents de certaines obligations de la réglementation non contrôlées jusqu’à présent notamment par l’ORIAS ;
2)    L’accompagnement des courtiers et de leurs mandataires pour mieux appliquer la réglementation dans un environnement contraint.

1.    Les Missions de vérification de la Conformité.
Le Nouvel article L 513-3 du code des assurances précise : « Aux fins de leur immatriculation au registre (ORIAS) mentionné au I de l’article L. 512-1, les courtiers d’assurance ou de réassurance, personnes physiques et sociétés immatriculées au registre du commerce et des sociétés pour l’activité de courtage d’assurance, et leurs mandataires, personnes physiques non salariées et personnes morales, adhèrent à une association professionnelle agréée chargée du suivi de l’activité et de l’accompagnement de ses membres. Cette association professionnelle représentative offre à ses membres un service de médiation, vérifie les conditions d’accès et d’exercice de leur activité ainsi que leur respect des exigences professionnelles et organisationnelles et offre un service d’accompagnement et d’observation de l’activité et des pratiques professionnelles, notamment par la collecte de données statistiques. »

De quoi s’agit-il exactement ?
a)    Concernant la médiation, chaque association professionnelle met à la disposition de ses adhérent le médiateur de l’association qui devra apparaître dans les mentions obligatoires relatives aux procédures réclamations et à la saisine du médiateur. Deux possibilités s’offrent aux courtiers : soit de garder le médiateur qu’ils avaient choisi, soit d’indiquer celui de l’association.

b)    Concernant la vérification des conditions d’honorabilité, de capacité professionnelle initiale, de formation continue : les courtiers devront fournir un organigramme à l’association avec les niveaux de capacité professionnelle des postes concernés, les descriptions de postes et les preuves du contrôle du niveau de capacité et du contrôle de l’honorabilité. Les associations auront de plus à vérifier la mise en place des 15H de formation continue pour le personnel concerné ainsi que le contenu desdites formations.
L’article R 513- du code des assurances précise : « .-L'association s'assure que le personnel concerné de ses membres respecte les conditions de capacité professionnelle prévues au I de l'article L. 511-2 et à l'article L. 512-5, selon la nature de l'activité exercée et des produits distribués, dans les conditions prévues aux articles R. 512-8 à R. 512-13 et R. 514-3 à R. 514-5.
« A cette fin, tout membre fournit à l'association, lors de son adhésion et du renouvellement de celle-ci, la liste nominative de ce personnel. Cette liste précise le poste occupé ainsi que les conditions de capacité requises pour ce poste et atteste des conditions d'obtention de ces niveaux de capacité.
« Il tient à disposition de l'association cette liste nominative mise à jour ainsi que les fiches de poste, la copie des diplômes, les titres ou certificats, les attestations ou livrets de stage et les attestations de fonctions.

« Art. R. 513-9.-L'association vérifie le respect par ses membres et leur personnel concerné des obligations de formation et de développement professionnels continus prévues au II de l'article L. 511-2 et à l'article R. 512-13-1.
« A cette fin, tout membre fournit chaque année à l'association une liste nominative du personnel concerné précisant le poste occupé ainsi que le nombre d'heures et les thèmes des formations suivies. Il tient à disposition de l'association tout élément justifiant du respect des exigences de formation mentionnées au premier alinéa, notamment les fiches de postes et les attestations de formation.

c) Concernant l’existence d’une assurance responsabilité civile professionnelle et d’une garantie financière, les associations devront vérifier l’adéquation de ces contrats avec le chiffre d’affaires des courtiers. Jusqu’à présent l’ORIAS vérifiait uniquement leur présence sans vérifier la cohérence des montants déclarés.


2. Les Missions d’accompagnement
Afin d’accompagner leurs membres dans la bonne exécution des obligations réglementaires, les associations se voient imposées la mise en place de plusieurs services :

– l’élaboration d’un guide de la capacité professionnelle, de la formation et du développement professionnel continus présentant une liste de formations adaptées au personnel concerné ;

– la réalisation d’enquêtes statistiques de leurs adhérents notamment leurs effectifs, les produits distribués, les volumes, la répartition de la clientèle, les difficultés de mise en œuvre de nouveaux thèmes réglementaires.

 Art. R. 513-12 du code des assurances– : « Dans le cadre de l’exercice de ses missions, l’association peut réaliser des enquêtes statistiques en vue d’une meilleure connaissance du marché y compris à la demande de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution »

 « Tout membre fournit annuellement à l’association des données relatives à l’organisation de son activité de distribution, à ses effectifs, aux produits distribués, à la répartition de la clientèle entre particuliers et professionnels, ainsi qu’aux fournisseurs des produits. L’association recueille ces éléments et les tient à la disposition de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution. »

– l’information des adhérents sur les évolutions réglementaires et la possibilité de les aider concrètement lors de difficultés rencontrées afin de protéger au mieux la clientèle de proximité.

Art. R. 513-13 : « L’association se dote de moyens pour accompagner ses membres dans l’exercice de leur activité et leur apporte notamment toute information pertinente relative aux évolutions de la règlementation »

Concrètement les associations devront fonctionner sur « déclaratif » de leurs adhérents et c’est uniquement tous les 5 ans que des contrôles sur pièces devront être réalisés

Pour finir les associations professionnelles devront se doter de « règles de gouvernance ». L’article R. 513-15 du code des assurances oblige l’association à se doter « de moyens » et « d’accompagner ses membres dans l’exercice de leur activité et le respect de leurs obligations », ce qui pratiquement oblige l’association agréée à mettre en place tout un processus de conformité, des procédures écrites, de se doter de moyens d‘archivage, mais également à dédier un personnel.

Le nouvel Art. L. 513-5.du code des assurances précise – . « Les associations professionnelles mentionnées au I de l’article L. 513-3 sont agréées par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution qui vérifie leur représentativité, la compétence et l’honorabilité de leurs représentants légaux et de leurs administrateurs, l’impartialité de leur gouvernance appréciée au regard de leurs procédures écrites ainsi que leur aptitude à assurer l’exercice et la permanence de leurs missions au travers de moyens matériels et humains adaptés. »

II « …Elles établissent par écrit et font approuver par l’ACPR, lors de leur agrément, les règles qu’elles s’engagent à mettre en œuvre pour l’exercice de leurs missions… ainsi que les sanctions qu’elles sont susceptibles de prononcer à l’encontre des membres. »

Elles « peuvent formuler à l’intention de leurs membres des recommandations relatives à la fourniture de conseils, aux pratiques de vente et à la prévention des conflits d’intérêts.
« Elles établissent un rapport annuel sur leurs activités, ainsi que celles de leurs membres sous une forme agrégée, qu’elles adressent à l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution. »

 

La réforme insiste sur la possibilité, au sens de l’article R. 513-16 du code des assurances, d’élaborer un « code de bonne conduite », susceptible d‘être homologué par l’ACPR au sens de l’article L. 612-29-1 du code monétaire et financier – on sait le peu d’écho que ce processus d’homologation a connu en assurances.

Enfin selon l’Art. L. 513-6. – « Une association … peut mettre fin à l’adhésion d’un de ses membres à sa demande.  Le retrait de la qualité de membre peut également être décidé d’office par l’association si le courtier, la société de courtage ou le mandataire ne remplit plus les conditions d’adhésion ou les engagements auxquels était subordonnée son adhésion ».

Il est clair que le retrait de la qualité de membre entraînera ipso-facto la radiation de l’ORIAS. Cette nouvelle prérogative donnée aux associations ne sera pas facile à mettre en œuvre et risque de poser de véritables problèmes de mise en œuvre compte tenu qu’un appel sera toujours possible devant le tribunal judiciaire.

L’Art. R. 513-15 du code des assurances précise « - Toute mesure disciplinaire, notamment la décision de retrait de la qualité de membre prévue à l’article L. 513-6, est prononcée par décision motivée d’une commission répondant à des garanties d’indépendance et d’impartialité, spécialement constituée au sein de l’association professionnelle agréée »

Les nouvelles associations professionnelles du monde du courtage seront possiblement dans le viseur de l’ACPR qui pourrait être amené à les sanctionner en cas de non-respect de leur rôle.
Cette sanction imprévisible laisse planer un doute sur les contrôles de l’ACPR quant aux missions des associations professionnelles.

Il est donc clair qu’il sera crucial pour les courtiers de respecter scrupuleusement la réglementation et de fournir systématiquement les pièces justificatives aux associations, et éviter ainsi le retrait de la qualité de membre de l’association qui entraînera ipso facto la radiation de l’Orias.

Pour permettre aux courtiers de respecter et de justifier leurs obligations de formation continue tant pour eux-mêmes que pour leur personnel, l’Ifpass propose de nombreuses formations éligibles DDA